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A l’origine du label B Corp l’on trouve trois personnes : Jay Cohen Gilbert, Bart Houlahan, Andrew Kassoy. Ils se rencontrent sur les bancs de l’université Stanford en Californie et partagent un constat : la financiarisation du rôle de l’entreprise n’est ni souhaitable, ni durable. Pour encourager un modèle économique plus inclusif, régénérateur et contributif au service de l’intérêt collectif, ils créent, en 2006, une organisation à but non lucratif. Cette dernière réunit les entreprises mettant l’impact social, environnemental et sociétal au cœur de leur raison d’être et de leur modèle d’affaire.
Le mouvement appelé B Corp prend rapidement une dimension internationale, aujourd’hui il est présent dans 70 pays. Fin 2020, 3600 entreprises dans le monde sont labellisées B Corp, 500 en Europe et 125 en France.
Le label B Corp repose sur un questionnaire en ligne gratuit, le BIA pour Business Impact Assessment, qui passe en revue cinq axes de l’entreprise : la gouvernance, les collaborateurs, la collectivité, l’environnement et les clients. Une fois le BIA complété, la branche audit de "Standard Trust", structure indépendante au sein de l’organisation internationale B Lab, passe en revue les réponses. Pour obtenir la certification l’entreprise doit atteindre au minimum la note de 80.
Le BIA mesure à la fois le modèle d’affaires et la capacité de l’entreprise à produire un impact environnemental, social et sociétal positif dans ses activités opérationnelles.
Depuis sa création le questionnaire a évolué et peut se prêter à de multiples usages: obtenir une première mesure du niveau d’impact de l’entreprise, trouver une référence pour se fixer des objectifs atteignables et pertinents, piloter la transformation ou le développement de son entreprise, mesurer sa transformation, demander la labelisation B Corp. D’ailleurs certaines entreprises choisissent de répondre au questionnaire pour mesurer leur impact sans aller jusqu’à la certification, un processus long et exigeant.
Implanté en France à l’initiative du cabinet Utopies en 2015, B Lab France étend son action au-delà des entreprises, au milieu universitaire et aux investisseurs. Il s’agit d’une part de travailler avec les professeurs de l’enseignement supérieur afin de sensibiliser les étudiants au concept d’entreprise à impact par le biais notamment d’études de cas concrets, de l’autre de sensibiliser les investisseurs en les amenant à utiliser le BIA pour accroitre la part des investissements à impact positif dans leur portefeuille d’entreprise.
Lemon Tri, entreprise française de tri et de recyclage affirme être "née B Corp" en 2011. Ses fondateurs tous deux sensibles à la protection de l’environnement identifient "des solutions pratiques, efficaces, empreintes de technologies d’avenir et déployables rapidement"[1]. Dès 2012 ils obtiennent l’agrément "ESS" devenu "ESUS" (Entreprise solidaire d’utilité sociale) et lorsqu’ils découvrent l’existence de la démarche B Corp, en 2016, leur entreprise conjugue déjà les trois piliers économique, environnemental, et social du développement durable. Ils entreprennent néanmoins la démarche de certification pour mesurer leur impact et obtenir un cadre de référence pour progresser. Après une revue du questionnaire, des interviews en anglais avec des représentants de l’équipe B Lab, plusieurs heures de travail, des allers-retours, ils soumettent leur dossier, obtiennent la note de 95,4 et la certification. Mais ce n’est qu’une première étape puisque trois ans plus tard, vient le moment de présenter une nouvelle demande. Cette fois le score s’élève à 130,2. "C’est dans la catégorie « collaborateurs » du BIA que notre progression est la plus marquée" explique Augustin Jaclin, co-fondateur et président de Lemon TRi. "Notre score s’explique notamment par la politique RH associée à nos actions d’inclusion sociale: diversité des profils recrutés, temps dédié à la formation, valorisation des compétences et des savoir-être plutôt que du diplôme et d’autres considérations". Le score révèle aussi les progrès réalisés en matière de gouvernance qui se traduit chez Lemon Tri par une réécriture des statuts. Le chef d’entreprise regrette que le label B Corp ne valorise pas tant les activités menées que la manière dont elles sont conduites. En revanche, selon lui, la labelisation apporte un certain nombre de bénéfices internes et externes, à court et long terme. D’une part la mobilisation et l’appartenance à un mouvement positif, les changements structurels, statutaires qui permettent une gouvernance plus ouverte, participative et transparente. De l’autre, un marqueur certifié auprès des partenaires avec lesquels le travail se déroule dans des conditions de confiance et un esprit collaboratif, l’inclusion dans un mouvement collectif d’entreprises partageant valeurs, choix et une certaine vision de l’économie plus redistributive.
[1] Témoignage extrait de l’ouvrage "Raison d’être, engagement et responsabilité. L’entreprise au-delà du capitalisme" sous la direction d’Alexandre Menais, LexisNexis, février 2021