Pour ou contre la culture d’entreprise

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Pour ou contre la culture d’entreprise

23 novembre 2021

Que l’on soit cheminot à la SCNF ou "sourcer" chez Facebook, on a au moins un point commun : une culture d’entreprise. Certes, fort différente. Mais celle de l’entreprise publique comme celle du géant du Web repose sur les mêmes fondements.

Ensemble de connaissances, de valeurs et de comportements partagé par la plupart des collaborateurs, la culture d’entreprise facilite le fonctionnement d’une entreprise. Elle s’articule autour de 4 thèmes formalisés dans les années 80 : les croyances, valeurs et normes (la vision du monde de l’entreprise), les mythes et héros (histoire de l’entreprise, vie des fondateurs, produits phares…), les rites et les codes (logo, jargon professionnel, séminaires, management participatif…) et les tabous (échecs, concurrents redoutés…).

Cet ensemble de repères "doit être appris et admis de façon le plus souvent implicite par les nouveaux membres pour qu’ils soient acceptés dans l’entreprise », selon Elliot Jacques, psychologue canadien spécialiste de la socio-analyse des entreprises. Mais depuis quelques années, cette acceptation est loin d’être acquise. Le concept fait débat. Pour ou contre ?

POUR

Renforce la cohésion interne : dans un environnement complexe et changeant, la culture d’entreprise permet aux salariés de se raccrocher à des repères communs. En période difficile, elle devient un cadre et peut apaiser les tensions. Elle facilite également l’intégration des nouveaux embauchés.

Accroît la motivation: une culture d’entreprise forte rassure les salariés et permet de les intégrer dans un projet commun et global. Ils seront ainsi d’autant plus motivés dans leur travail quotidien.

Améliore la compétitivité de l’entreprise : des salariés motivés sont généralement plus productifs. En standardisant les comportements, la culture d’entreprise facilite le travail en commun et le traitement des imprévus, c’est ce que l’universitaire canadien Henry Mintzberg appelle l’"ajustement mutuel".

CONTRE

Marginalise les plus réticents : faut-il adhérer aux valeurs de l’entreprise et à sa culture pour être performant ? La question se pose et soulève le problème de l’éventuelle marginalisation de certains salariés risquant d’en faire des freins au bon développement de l’entreprise.

Provoque des effets pervers : une culture d’entreprise trop forte avec des règles trop rigides peut susciter le rejet. Jugée omniprésente et pour certains même intrusive, elle devient un dogme raillé voire dénoncé, pouvant saper le travail d’équipe.

Favorise l’entre-soi : conformisme, immobilisme, repli sur soi, la culture d’entreprise peut devenir un obstacle à l’innovation et à la prise de risque. Maurice Thévenet, professeur et auteur de "La culture d’entreprise" (Presses universitaires de France – 1993), appelle cela le "nombrilisme".

Freine le changement :  à l’heure de l’économie 2.0, si la culture d’entreprise est perçue comme un référentiel indépassable, elle devient un obstacle au changement avec un collectif figé et déconnecté de la réalité.

En somme, la culture d’entreprise est un atout à condition qu’elle reste évolutive. Quant à vouloir la reléguer au cimetière des idées dépassées, ce serait une erreur selon Maurice Thévenet : "Pour ceux qui abordent l’entreprise avec le respect dû à ce qu’exige l’effort de la compréhension, la culture donnera toujours une ouverture de perspective qui met en valeur ce qui est commun plutôt que ce qui est différent, ce qui situe la force de l’instant par rapport à la richesse d’un passé pour honorer un futur." (1)

(1) "Le déclin provisoire de la culture d’entreprise", tribune parue dans la revue "Humanisme et Entreprise", 2010.